Vivek Chibber, “L’universalisme, une arme pour la gauche”, Le Monde diplomatique, mai 2014
Que reste-t-il de la critique radicale si on la prive de la notion de capitalisme ? Comment interpréter la crise qui balaie le monde depuis 2007, comment comprendre le sens des politiques d’austérité si l’on ne tient pas compte de l’implacable course aux profits qui détermine la marche de l’économie ? Que penser de la résistance planétaire qui a fait résonner les mêmes slogans au Caire, à Buenos Aires, New York ou Madrid si l’on se refuse à y voir l’expression d’intérêts universels ? Comment produire une quelconque analyse du capitalisme en répudiant toute catégorie universalisante ?
En propulsant nombre de pays sur la voie du développement industriel, la décolonisation a engendré un prolétariat immense. Mais à cet essor correspond paradoxalement un émiettement des luttes. Certains intellectuels radicaux estiment que les notions de classe ou de capitalisme, sorties des forges occidentales, sont inadaptées à d’autres contextes. Et que les peuples du Sud doivent d’abord se réapproprier leur histoire et leur culture.
Vivek Chibber leur réplique.