Pierre, “Belle Époque & xénophobie”, Traits noirs, no 9, janvier 2003
Le 16 août 1893, pour une chemise « italienne » lavée dans de l’eau « française », les ouvriers français des salines d’Aigues-Mortes déclenchent une chasse à l’Italien ; interrompue par l’arrivée de l’armée, elle se solde par la mort d’au moins huit ouvriers italiens et des dizaines de blessés. Le sang répandu lors de cette « collision », fortement médiatisée et qui causa un grand émoi des deux côtés des Alpes, est loin d’être un fait isolé, mais plutôt un symptôme du mal qui ronge alors une partie du prolétariat français : la haine et la peur de l’étranger, et notamment de l’Italien.
Une certaine réécriture contemporaine de l’histoire, oublieuse, tend à faire croire que les immigrés italiens (européens, voisins, travailleurs, catholiques) furent, « à l’époque », bien accueillis et rapidement intégrés dans le bel Hexagone. La réalité n’est pas si reluisante.